Riex historique
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Création de Riex - commune autonome

lors du démembrement de la Commune générale de Villette :

Le texte qui suit est un condensé du mémoire de licence de M. Jean-Michel Savary, en faculté des lettres de l’Université de Lausanne. Ce document nous a été aimablement remis par son père, M. André Savary, ancien pasteur de la paroisse de Cully, Epesses et Riex, et aujourd’hui retraité.

Un excellent opuscule a vu le jour cet été, sous la plume de M. Louis-Daniel Perret, historien, intitulé "Dans la grande Commune de Villette, la Bourgeoisie d'Aran et Chatagny". La commune de Villette a soutenu la création de cette brochure, dont elle nous a gracieusement offert un exemplaire, qui peut être consulté au bureau communal.

Sommaire :

Cliquer sur les titres :

Historique de la région
Division territoriale de la Paroisse de Villette
La confrérie de Riex
Abus des confréries
Pétitions et plaintes des habitants
Elaboration du décret
Division du territoire
Mémoire des confréries de Riex, Cully, Grandvaux, Chenaux et Curson
Décret du 15 mai 1824
Application du décret
Formation des différentes commissions
Superficie assignée à chaque commune
Rachat des charges
Partage de l’excédent des biens
Choix des bourgeoisies
Répartition des pauvres
Répartition des biens de la Commune générale
Ratification de l’acte de partage
Election des nouvelles autorités communales
Réunification des communes de la Paroisse de Villette

Historique de la région.

Le terme de Lavaux n’apparaît qu’au 12ème siècle. Lavaux ou « la Vallée » fut d’abord associé à celui de Lutry. En effet, une bulle d’Innocent II fait mention en 1138 de « vallis de Lustriaco », expression qui, traduite en français de l’époque, devint « la Vaulx de Lustrie ». Par la suite, ce terme engloba dans les documents les localités voisines : Riex en 1327, Aran en 1329 et Villette en 1330.

Dès lors, « la Vaulx de Lutry » a été couramment employé jusqu’à la fin du 15ème siècle pour désigner exclusivement la paroisse de Villette, soit le territoire qui forme actuellement le cercle de Cully. Ce n’est qu’au début du 16ème siècle que « la Vaulx » se contracta en « Lavaux » et qu’on appliqua ce vocable aux paroisses de Lutry, Saint-Saphorin et Corsier.

A ce moment, le nom de Lavaux recouvrait donc l’ensemble des terres appartenant, le long du lac, à l’évêque de Lausanne, et l’expression géographique de Lavaux se doubla au cours des siècles d’un sens politique.

En matière ecclésiastique, Lavaux était divisé en quatre grandes paroisses : Lutry, Villette, Saint-Saphorin et Corsier. Ces communautés se transformèrent plus ou moins vite en associations à caractère mi-religieux, mi-civil, très soucieuses de défendre leurs libertés et franchises.

La conquête bernoise n’apporta pas de profondes modifications ; suivant le système imposé par les nouveaux maîtres, Lavaux devint une partie du baillage de Lausanne. Les quatre paroisses abandonnèrent de plus en plus leur statut religieux pour adopter un caractère purement civil.

Lors de la révolution vaudoise, comme partout ailleurs dans le canton, les baillages furent remplacés par les districts. Les paroisses de Lutry, Villette et Saint-Saphorin formèrent alors le district de Lavaux, alors que Corsier fut versé dans celui de Vevey. Les trois cercles actuels du district de Lavaux correspondent aux trois anciennes paroisses.

Le début du 19ème siècle marqua le fractionnement des paroisses de Lavaux. En 1810, Saint-Saphorin fut la première à se diviser en 4 nouvelles communes, Saint-Saphorin, Rivaz, Chexbres et Puidoux. En 1823, Savigny se détacha de Lutry et en 1824, le décret instituant le partage de Villette en 6 communes fut accepté. Pour terminer, signalons que Corsier, ancienne paroisse de Lavaux, fut disloquée en 1829, formant les quatre nouvelles communes de Corsier, Corseaux, Chardonne et Jongny.

Division territoriale de la Paroisse de Villette.

Dès le régime bernois, la paroisse acquit un statut purement civil, et l’on parla alors de
« Commune générale de Villette ».

On faisait tout d’abord une distinction entre le vignoble et les Monts de Villette (actuel territoire de Forel). Le vignoble était ensuite divisé en huit parties appelées « quarts ».

Quarts de deçà :


1-2) Cully, comptant pour deux quarts en raison de l’importance de sa population
3) Riex
4) Epesses, le quart d’Epesses se subdivisant lui-même en « tiers », Epesses pour 2/3 et le Crêt d’Epesses pour 1/3, subdivision abolie en 1658.

Quarts de delà :

1) Grandvaux
2) Chenaux et Bahyse
3) Curson, Lalex, Crête, Baussan
4) Aran, Villette, Chatagny

La division en quarts avait pour but de fixer les représentations au Conseil et au Rière Conseil de la Commune générale. Les habitants des Monts de Villette, dont le territoire n’était pas compris dans cette division, ne participaient de ce fait pas à l’organisation communale et étaient administrés par les bourgeois du vignoble.

Au cours des 16ème et 17ème siècles, le pouvoir communal s’était considérablement affaibli, ayant distribué une grande partie des biens communaux à des confréries de caractère semi-privé, en leur abandonnant la plupart des services publics. La commune se trouvait donc délestée de tout pouvoir financier, laissant ainsi une liberté quasi-totale aux confréries pour l’utilisation des fonds publics.

La situation n’était guère meilleure quant au pouvoir politique et les Conseils et Rière Conseils devinrent rapidement une autorité factice sans aucune indépendance vis-à-vis des confréries. Seule, la rivalité qui existait entre certains conseillers imposaient des limites aux exactions de certaines de ces corporations.

Lavaux comptait les huit confréries de Cully, Riex, Epesses, Grandvaux, Curson, Chenaux, Aran et Villette, mais celles-ci ne correspondaient pas exactement aux 8 quarts territoriaux.

La confrérie de Riex.

Grâce au rapport de 1813, on connaît assez précisément les conditions d’entrée dans cette confrérie :

• Étant marié, être âgé de 25 ans révolus
• Etant célibataire, avoir 30 ans révolus
• Etre reconnu par l’assemblée des membres comme étant de bonnes mœurs et de bonne conduite
• Avoir son domicile dans le quart de Riex
• Payer 4 francs d’émoluments lors de son admission
• Prêter serment de se conformer aux règlements

Plus tard, il fallut en outre appartenir à l’une des familles de la confrérie pour pouvoir y adhérer.

L’assemblée générale nommait un président, ou banderet, un secrétaire, un gouverneur et un recteur des pauvres, ces charges étant bien sûr rémunérées.

Contrairement à ce qui se passait dans la confrérie de Cully, seule l’assemblée générale de tous les membres était compétente pour gérer les biens ; on évitait ainsi des dépenses faites au profit de certains membres.

Après avoir réglé toutes les dépenses, les confrères recevaient annuellement une participation aux bénéfices : elle s’éleva en 1811, par exemple, à 8.- Fr par confrère.

Les 3 confréries de Cully, Riex et Epesses étaient d’autre part responsables de l’entretien du temple de Cully, et se partageaient les frais de la manière suivante (qui a subsisté jusqu'au début des années 2000) : Cully ½, Riex ¼, Epesses ¼.

Abus des confréries.

Dans leurs activités, les confréries avaient donc tout des services publics, directement dépendants des autorités communales. Mais elles pratiquaient un double jeu : quand il fallait percevoir de l’argent ou réclamer des journées de travail, elles se comportaient en effet comme des services publics ; à l’inverse quand il s’agissait de contrôler leur gestion ou l’origine de leurs fonds, les confréries déniaient tout droit d’inspection aux autorités communales ou cantonales, prétextant qu’elles n’étaient que de simples associations privées.

La confusion qui est faite entre bourgeoisie et confrérie est révélatrice de la difficulté qu’il y avait à déterminer si ces groupements constituaient des associations publiques ou privées. Elles assumèrent très tôt des charges publiques, mais sans que ce statut soit légitimé et ratifié par des lois, et les confréries pouvaient évidemment profiter de cette lacune : « plusieurs confréries ont vendu des fonds pour en acheter d’autres sans avoir demandé l’autorisation au Petit-Conseil ; elles estiment qu’on ne peut les envisager que comme des sociétés particulières soit bourses de familles, et en conséquence elles prétendent ne devoir pas être assujetties sous ce rapport aux mêmes conditions que les communes. »

Pétitions et plaintes des habitants.

Les habitants des différents quarts, non-membres des confréries, se plaignirent à plusieurs reprises des taxes et travaux qu’on leur imposait et cela, ajoutaient-ils, dans le seul but d’enrichir les confréries.

En 1799, par exemple, plusieurs habitants de la Commune générale envoyèrent une pétition aux Conseils législatifs Helvétiques, demandant que l’on instaurât des Chambres de Régie pour gérer les biens des confréries. Celles-ci s’empressèrent d’envoyer au gouvernement une requête demandant que leur statut de simples groupements privés soit préservé.

Le gouvernement refusa d’entre en matière et fit paraître un décret qui confirmait l’autonomie des confréries et leur indépendance vis-à-vis de l’autorité communale.

En 1813, à la suite de nombreuses plaintes, le Petit-Conseil décida d’envoyer son Lieutenant visiter ces confréries pour faire un rapport circonstancié sur leur organisation. Le 31 août 1813, malgré les protestations des confréries, le Petit-Conseil décida en conséquence que l’administration des biens des confréries devait être mise sous la même surveillance que celle des biens communaux.

Le Grand-Conseil ratifia ensuite, le 2 juin 1815, l’article 101 de la loi sur l’organisation des municipalités, allant dans le même sens, mais cette décision n’entraîna pas cependant une meilleure organisation et gestion à l’intérieur des confréries.

En 1821, certains membres de la confrérie de Cully, avec à leur tête le pasteur Bidaux, envoyèrent une pétition dans laquelle ils critiquaient violemment le Conseil de leur confrérie. Ils s’insurgeaient contre le fait que les Conseillers s’octroyaient tous les travaux que la confrérie avait à effectuer ; les vignes étaient, selon les pétitionnaires, mal exploitées, et une partie du vin de la confrérie finissait dans les caves des conseillers. Pour terminer, les comptes n’étaient pas rendus chaque année, comme le précisait le règlement de 1750.

Le département de l’intérieur confirma ces propos et releva entre autres « que la comptabilité de la confrérie de Cully n’était pas tenue de façon légale, que les pauvres n’étaient pas suffisamment assistés, que l’entretien des bâtiments publics laissait à désirer, alors que les membres du Conseil se répartissaient généreusement certains bénéfices. »

L’inévitable résultat de ces nombreux abus devait être le démembrement de la Commune générale, la loi du 2 juin 1815 étant restée sans effet.

Elaboration du décret.

A la fin de 1822, les habitants d’Epesses demandèrent, dans une pétition envoyée au Conseil d’Etat, à ce que leur quart formât à lui seul une commune autonome, pétition signée par tous les habitants, membres de la confrérie ou non. Cette nouvelle entente était due au fait que la confrérie était très appauvrie, et qu’en conséquence les chemins étaient très mal entretenus et les bâtiments publics étaient dans un état de délabrement avancé.

En janvier 1823, les hameaux de Forel, Aran et Villette envoyèrent des pétitions allant dans le même sens. A la suite de ces requêtes, le Conseil d’Etat décida en principe qu’il y aurait partage de la Commune générale de Villette. On nomma en conséquence, au début de 1823, une commission chargée de prendre l’avis des représentants de la Commune générale et de voir quels allaient être les avantages ou désavantages d’un tel démembrement.

Dans son rapport, la commission se déclarait favorable au démembrement, et ceci pour les raisons suivantes :

1) Le démembrement avait l’avantage de mettre fin aux conflits qui opposaient continuellement les confréries

2) Il mettrait un terme à la mauvaise administration des confréries. La commission estimait que les confrères qui avaient fait preuve de parcimonie et de mauvaise gestion étaient responsables du mauvais entretien de certains quarts.

3) La superficie de la Commune générale et sa division en quarts occasionnait de grands frais administratifs qu’il fallait absolument supprimer.

4) La réunion des biens tant particuliers que généraux qui aurait lieu en faveur des nouvelles communes favoriserait une meilleure administration.

5) Le démembrement allait permettre de clarifier les droits des familles à charge commune de Villette et Lutry.

6) Finalement, la commission estimait que le partage allait faire disparaître les différences et jalousies qui avaient considérablement entravé l’administration de la Commune générale.

Division du territoire.

Le 20 mai 1823, le Département de l’Intérieur estima dans un rapport que « la division en six communes était celle qui comportait le moins d’inconvénients parce qu’elle était souhaitée de tous côtés et qu’elle prévenait les rivalités et jalousies qui auraient pu exister dans de grandes communes ». Il proposait en conséquence la division suivante:

1) Les Monts de Villette, chef-lieu Forel

2) Villette et Aran, chef-lieu Villette

3) Grandvaux, Chenaux et Curson, chef lieu Grandvaux

4) Cully

5) Riex

6) Epesses

Cette division fut refusée par le Grand-Conseil le 6 juin 1823, et la commission fut chargée de demander leur avis aux confrères et habitants des différents quarts.

Les confrères de Cully et Riex ne désiraient pas le partage, contrairement aux non-membres, qui étaient favorables à un démembrement en six communes.

La confrérie de Chenaux souhait former une commune indépendante.

Celle de Curson souhaitait être rattachés à Grandvaux et non à Chenaux.

Tous les ressortissants d’Aran et Villette étaient favorables au démembrement, à condition qu’Aran et Villette ne forment qu’une seule commune.

Les confrères de Grandvaux désiraient le statut quo, alors que les non-membres étaient favorables à une nouvelle commune, mais sans Chenaux et Curson.

En dernier lieu, les habitants des Monts de Villette étaient très favorables au démembrement, pour autant qu’une grande partie des biens de la Commune générale fût versée dans leur nouvelle bourse communale.

On pouvait donc remarquer deux groupes bien distincts :

• Les confréries qui n’avaient pas de grandes ressources financières étaient favorables au démembrement, qui leur permettait de repartir sur des bases financières plus saines.

• Au contraire, les confréries « riches » comme celles de Cully, Riex et Grandvaux voyaient d’un mauvais œil tout partage.

La division finalement adoptée fut alors celle qui subsiste encore aujourd’hui.

Mémoire des confréries de Riex, Cully, Grandvaux, Chenaux et Curson.

Le Conseil d’Etat rédigea en mai puis en août 1823 les deux premiers projets de décret, qui furent rejetés par le Grand-Conseil, qui les estima trop lacunaires et imprécis. Il souhaitait également que l’on prît l’avis des confréries.

Celles rédigèrent alors, en avril 1824, un mémoire à l’intention du Grand-Conseil, dans lequel elles déclaraient en substance que « leurs biens étaient privés et devraient revenir aux familles auxquels ils appartenaient, si un démembrement devait avoir lieu». Il contestait également l’autorité du Conseil d’Etat pour « régler les difficultés s’élevant lors du démembrement. »

Décret du 15 mai 1824.

Loin de tenir compte des récriminations des confréries, le Grand-Conseil adopta, le
15 mai 1824, le décret sur le démembrement de la Commune générale de Villette :

Le Grand-Conseil du Canton de Vaud,

Sur la proposition du Conseil d’Etat

Vu les pétitions qui ont été présentées au Conseil d’Etat pour demander le partage
et la division de la Commune générale de Villette

Vu le rapport du Conseil d’Etat sur les inconvénients et les difficultés qui naissent
du mode actuel de l’administration de cette grande commune

Et considérant les avantages qui doivent résulter du partage proposé,

Décrète :

Article 1er. La commune générale de Villette sera divisée en 6 communes, savoir :

1) Cully et Chenaux ; chef-lieu Cully ;

2) Riex ;

3) Epesses ;

4) Grandvaux et Curson ; chef-lieu Grandvaux ;

5) Villette et Aran ; chef-lieu Villette :

6) Forel, qui comprend les Monts de Villette.

Ce décret comprend 10 articles, qui définissent au mieux les modalités de l’opération.

Application du décret.

Bien avant le 15 mai 1824, en raison des rumeurs de démembrement, les confréries ne voulaient plus effectuer de nouvelles dépenses pour les bâtiments publics, vignes, chemins ou fontaines : la plupart des habitants réclamaient donc que la dislocation s’effectuât le plus rapidement possible.Les modalités d’application durèrent cependant plus de deux ans.

Formation des différentes commissions.

La première tâche fut de former les conseils provisoires de chaque commune, la délégation chargée du partage et les représentants des confréries. Le conseil provisoire fut le suivant

- Cully : M. le Juge Abram Rey

- Riex : M. Abram-Frédéric Lin

- Epesses : M. Louis Fonjallaz

- Grandvaux : M. François Lederrey, municipal

- Villette : M. Jacques-Louis Parisod

- Forel : M Jean-François Noverraz

En parallèle, les confréries désignèrent les représentants suivants :

- Cully : M. le syndic Bidaux

- Chenaux : M. Paul-Frédéric Chambaz

- Riex : M. François-Gédéon Borgognon

- Epesses : M. Jean-Antoine Fonjallaz

- Grandvaux : M. Dumur père

- Curson : M. Jean Cuénoud

- Aran : M. Jean-Louis Parisod

- Villette : M. Samuel Lin

Superficie assignée à chaque commune.

Une des premières tâches de la délégation fut de fixer la superficie territoriale assignée aux nouvelles communes.

En juin 1824, M. Roguin de Bons proposait donc que les anciens quarts forment approximativement le support territorial des nouvelles communes. Riex posait cependant un épineux problème, car c’était la seule commune du vignoble à ne pas avoir accès au lac. Son conseil provisoire s’en plaignait d’ailleurs amèrement :

« … tandis que les communes d’Epesses, Grandvaux et Villette aboutiront au lac, la commune de Cully, voulant se servir des bornes de la confrérie de Cully, cherche à étendre son territoire tout le long du lac, jusque sous les murs et même dans une partie du village de Riex, pour ne laisser à cette commune que le terrain le plus élevé du côté de la montagne de Gourze, ce qui ne serait ni juste ni équitable.»

Il faut savoir à ce propos que l’accès au lac était d’un grand intérêt économique car il permettait de s’approvisionner en sables et graviers, et d’établir un éventuel port de pêche.

Le Conseil d’Etat refusa cependant de tenir compte de la requête de Riex, prétextant « qu’il serait fort dommageable pour Cully de se voir enlever son port sur lequel elle devait exercer une surveillance continuelle. » En contrepartie, il fit inscrire dans l’acte de partage la réserve selon laquelle toutes les communes devaient avoir le droit de prendre le gravier et le sable dont elles pourraient avoir besoin.

Ce ne fut qu’en juillet 1825 que les limites des différentes communes furent définitivement fixées et légalisées. En comparaison avec les quarts, les nouvelles communes allaient avoir une superficie beaucoup plus grande et s’étendant plus au nord.

Rachat des charges.

L’article 5 du décret mentionnait qu’il serait fait, sur les biens de chaque confrérie, un prélèvement à titre de rachat des charges et dépenses publiques que les confrères avaient assumés dans la passé. Comme on l’imagine, l’exécution de cet article posa les plus épineux problèmes à la délégation chargée du partage : en effet, quelques confréries refusèrent systématiquement toutes les taxations qui leur furent soumises. D’autres se soumirent sans trop de contestations à ces taxations :

- Aran : la confrérie était fort pauvre, et dut verser en conséquence l’entier de son avoir, soit 9’211 Fr

- Villette : la confrérie se trouvait dans une situation financière encore plus défavorable que celle d’Aran, elle dut également verser l’entier de son avoir, soit 1'540 Fr

- Riex : la confrérie était beaucoup plus prospère, et dut s’acquitter d’un montant global de 60'200 Fr

- Epesses : cette confrérie, fort démunie, avait également accepté de remettre à la nouvelle commune l’ensemble de ses biens, estimés à 8’643 Fr

- Curson : la confrérie protesta contre la façon avec laquelle elle avait été taxée. Après moult palabres, elle s’acquitta de 5'295 Fr

- Grandvaux :le Conseil d’Etat approuva les estimations du Conseil provisoire, et la confrérie dut payer à contre-cœur un montant de 27'636 Fr

- Chenaux : la confrérie, pour soutenir celle de Cully, s’opposa aux taxations proposées. Tout rentra rapidement dans l’ordre et la confrérie, très démunie, céda l’ensemble de ses biens, pour un montant de 7'485 Fr

- Cully : ce fut la confrérie qui refusa le plus violemment les taxations faites. Le 23 octobre 1824, le Conseil d’Etat, à qui la délégation avait remis son rapport, rendit une décision acceptant le décompte proposé. Le 30 novembre de la même année, la confrérie de Cully fit éditer un mémoire dans lequel elle exposait ses objections et réclamations.

A la suite de ce mémoire, le Conseil d’Etat déclara qu’il ne croyait pas « être appelé à répondre à des déclarations aussi peu mesurées. » Il remit alors le mémoire au Grand-Conseil, qui confirma la décision du 23 octobre. La confrérie de Cully se devait alors d’effectuer 201'385 Fr de paiements. Le 14 décembre 1824, la confrérie refusa de discuter du mode de paiement, prétendant vouloir faire recours à l’autorité supérieure.

Le 26 janvier 1825, onze membres de la confrérie de Cully envoyèrent une pétition se plaignant « des partages secrets qui se faisaient entre certains confrères. » D’autre part,
M. Roguin de Bons avait appris de son côté qu’une commission secrète s’était formée, qui employait l’argent à discrétion et dont le but avoué était d’entraver les démarches relatives à l’application du décret. Il proposa alors de mettre en régie les biens de la confrérie de Cully.

Suite à cette demande, le Conseil d’Etat envoya un dernier ultimatum à la confrérie de Cully, en leur fixant un ultime délai au 31 janvier 1825. Celle-ci ne se laissa pas impressionner, et envoya une nouvelle pétition prétendant que le Conseil d’Etat n’avait qu’une autorité administrative et ne pouvait pas leur enlever des propriétés sans décision des tribunaux.

M. Roguin de Bons remarquait que la résistance de la confrérie de Cully influait sur tous les esprits et tendait « à paralyser la culture des terres et à désorganiser l’administration des biens ». Ayant déjà reçu des menaces de mort, il se demandait s’il n’était pas nécessaire d’envoyer la force armée à Cully pour y rétablir l’ordre.

Le Conseil d’Etat n’en arriva pas là, mais adopta, le 1er février 1825, un texte qui prononçait la mise sous régie la confrérie de Cully, en suspendant immédiatement son Conseil et en désignant un Conseil de régie. Il fut alors possible de mettre rapidement un terme aux négociations.

Il semble que le premier souci du Conseil d’Etat ait été de donner une assise financière confortable aux nouvelles communes. Mais le gouvernement faisait d’une pierre deux coups, en décidant du rachat des charges, il consacrait en plus la dissolution des confréries qui avaient été une source constante de plaintes et de mécontentement.

Partage de l’excédent des biens.

Selon l’article 6 du décret du 15 mai 1824, les confrères devaient se partager les biens qui pouvaient subsister après les différents rachats. Seules les confréries Cully, Riex et Grandvaux furent concernées, les autres ayant dû verser l’ensemble de leurs biens.

Pour opérer le partage, il fallut dénombrer les bourgeois de chaque commune. Un nommé Jean-Louis Davel profita de la situation en se mariant et inscrivant sa nouvelle épouse le dernier jour du délai fixé.

Choix des bourgeoisies.

De nombreuses personnes étaient bourgeoises de la Commune générale, sans faire partie d’aucune confrérie ou bourgeoisie locale. Il s’agissait donc de replacer tous ces bourgeois dans l’une des six nouvelles communes.

Une publication invita donc chaque bourgeois à se faire inscrire en désignant la commune qu’il choisissait. Cela n’alla pas sans problème, puisque chacun voulait d’abord connaître le montant du prix d’entrée pour chaque commune avant de faire son choix.

Un prix provisoire fut alors fixé, après de savantes estimations : 80 Fr pour Cully, 32 Fr pour Grandvaux, 48 Fr pour Riex, 22 Fr pour Epesses, 10 Fr pour Villette et 3 Fr pour Forel.

Les membres de la confrérie de Cully envoyèrent une nouvelle pétition, par laquelle ils protestaient contre le prix fixé, qu’ils jugeaient anormalement bas eu égard aux sommes importantes que leur confrérie devait verser dans la nouvelle commune.

Pour une fois, le Conseil d’Etat leur donna raison et fixa lui-même, le 18 avril 1825, les prix suivants : 349 Fr pour Cully, 225 Fr pour Grandvaux, 91 Fr pour Riex, 45 Fr 2 bz 4 rp pour Villette, 24 Fr pour Epesses. Aucun versement ne fut exigé pour l’entrée en bourgeoisie à Forel.

A la suite de toutes ces démarches, on put faire le décompte suivant pour toutes les communes :

1075 bourgeois s’inscrivirent à Forel, 512 à Villette, 208 à Epesses, 200 à Cully, 110 à Riex et 32 à Grandvaux.

La méthode employée comportait malgré tout de sérieux défauts : en effet, comme le prix d’entrée était fixé en fonction de ce qu’avaient versé les confréries, ce sont les communes qui avaient le moins reçu qui virent affluer une foule de bourgeois peu aisés, uniquement attirés par le prix d’entrée modique, ce que montre le nombre de bourgeois inscrits à Forel.

Répartition des pauvres.

Il restait, selon l’article 8 du décret, à répartir entre les communes les bourgeois assistés par la bourse publique. On en dénombrait au total 1058.

Le conseil d’Etat décida que, pour respecter une certaine équité, que les pauvres seraient répartis en proportion du nombre de bourgeois et de la richesse de chaque commune.

Cette 2ème conditions était nécessaire pour éviter une distorsion comme celle apparue ci-dessus.

En fonction de ces deux paramètres, la répartition donna les résultats suivants :

Cully se vit attribuer 337 pauvres, Forel 273, Riex 135, Villette 135, Epesses 105 et Grandvaux 73.

La répartition se fit par tirage au sort, le 11 mai 1826. On utilisa trois sacs : le premier contenait six billets contenant les noms des six communes, le deuxième renfermait les noms de tous les pauvres par famille, alors que le dernier était consacré aux pauvres n’ayant pas de famille.

Suite à une inscription tardive, cinq pauvres supplémentaires furent portés à la charge de Riex, qui se trouvait en fin de liste.

Répartition des biens de la Commune générale.

L’article 4 du décret prévoyait un partage dans la proportion du nombre des bourgeois. Les biens de la confrérie consistaient en bois, pour 157'235 Fr, un domaine en Gourze, pour 6'623 Fr, divers immeubles répartis dans les communes, pour 28'511 Fr et des créances diverses pour 100'472, soit un montant global de 293'841 Fr 3 bz

En fonction de divers paramètres, les communes reçurent les montant suivants :

Cully 274'425 Fr, Riex 94'271 Fr, Epesses 46'052 Fr, Grandvaux 52'508 Fr, Villette 50'180 Fr et Forel 83'137 Fr

Ratification de l’acte de partage.

L’acte définitif de partage de la Commune générale de Villette fut signé le 11 août 1826 par les membres de la délégation chargée du partage et il fut approuvé par le Conseil d’Etat de 7 octobre de la même année.

Election des nouvelles autorités communales.

Il fallut tout d’abord procéder à un recensement de la population de chaque commune.
Les résultats furent les suivants :

Cully 970 habitants, Forel 954, Grandvaux 592, Riex 464, Epesses 332 et Villette 295.

Cully, Forel et Grandvaux éliraient des conseils communaux, alors qu’Epesses, Riex et Villette auraient des conseils généraux.

Epesses et Villette devraient élire des municipalités de 7 membres, alors que ce nombre serait de 9 pour Riex.

L’assermentation des nouvelles autorités eut lieu le 5 décembre 1826 à Grandvaux, le 7 décembre à Riex et Epesses, le 9 décembre à Villette, le 12 décembre à Cully et le 14 décembre à Forel.

 

Cet acte final marquait enfin la conclusion du démembrement et du partage de la Commune générale de Villette.

Réunification des communes de la Paroisse de Villette.

Il est amusant de constater que, 180 ans plus tard, les 5 communes dites "du bas", soit celles du cercle de Cully, sans Forel, ont tenté une réunification. Après 4 ans de travaux préparatoires, son principe a été approuvé avec enthousiasme par 4 des communes, mais a malheureusement capoté en raison du refus, du bout des lèvres, des citoyens de Grandvaux.

Heureusement, la fusion a finalement été acceptée en 2009, à une confortable majorité, et la nouvelle commune de Bourg-en-Lavaux verra le jour au 1er juillet 2011 !


 

 
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